WER, 6 Nations, le rugby féminin à quasi maturité avant la Coupe du Monde
A la veille de l’ouverture de 2 tournois majeurs, les 6 Nations, épreuve historique du rugby européen, et de la saison inaugurale de la Women Elite Rugby, le championnat américain impulsé entre autres par Michele Kang, proposons un (nouveau) point sur le développement du rugby féminin mondial, propulsé dans une dynamique positive depuis 2022.
Une pratique démocratisée et globalisée
Avec plus de 2 millions de pratiquantes recensées dans le monde en 2024 c’est près d’un tiers des joueurs de ballon ovale qui sont des femmes, rapportait World Rugby en janvier 2024. Une démocratisation rapide et puissante (+7% au global, +53,2 % sur les « participantes ») qui s’appuie sur une stratégie très internationalisée touchant désormais plus de 80 fédérations sur les 132 que compte l’instance internationale.
La croissance du rugby féminin s’appuie en partie sur le dynamisme impulsé par le « Sevens », le format olympique du rugby à 7 dont la saison traverse 4 continents sur 7 étapes : Dubaï, Le Cap, Perth, Vancouver, Hong-Kong, Singapour et Los Angeles. Spectaculaire, intense et donc multipolarisé, le Sevens participe à conquérir de nouveaux territoires et à séduire les joueuses.
Sur les territoires historiques du rugby, la progression de la pratique féminine est largement enclenchée. En Angleterre, entre 2021 et 2024, ce sont près de 15 000 nouvelles pratiquantes qui ont rejoint les mêlées (environ 55 000 licenciées). En France, Carole Gomez avait recensé 26465 joueuses en 2021, et l’INJEP recense en 2023 48 895 rugbywomen parmi les 1 783 clubs.
Quant au territoire américain, principale opportunité de développement, il peut compter sur une hausse massive du nombre de jeunes joueuses.
Le boom de la médiatisation
Au-delà de la croissance de la pratique féminine, c’est un engouement global qui est observé à travers la médiatisation du rugby féminin :
Quant à la dernière Coupe du Monde, elle avait attiré plus d’1,3 millions de téléspectateurs néo-zélandais, et plus de 2 millions de téléspectateurs dans le monde (800 000 anglais pour la finale).
A la visibilité des tournois internationaux s’ajoute la popularité croissante des compétitions domestiques. En Angleterre comme en France, les diffuseurs proposent désormais une couverture optimale des premières divisions : sur la plateforme TNT, à hauteur de 20 matches pour la PWR, et à travers le doublonnage des affiches masculines et féminines, pour les meilleures rencontres de la saison, pour Canal + et l’Elite 1 française.
C’est bien sûr à travers les réseaux sociaux qu’on constate l’engouement nouveau et croissant autour du rugby féminin. On compte bien sûr les 10,4 millions d’heures visionnées sur TikTok pour le tournoi W6N 2024 (222 millions de vues), mais il faut surtout reconnaître la déferlante Ilona Maher sur les réseaux sociaux du rugby mondial.
Personnalité la plus suivie du rugby avec plus de 8 millions de followers sur Instagram et TikTok, l’américaine (1,4 milliard de vues sur TikTok) emmène avec elle une communauté croissante et enthousiaste vers le rugby féminin.
Vers la professionnalisation des compétitions
Dans le sillage du championnat anglais, semi-professionnel, les compétitions domestiques se structurent à marche forcée. Sous l’impulsion des fédérations, accompagnées parfois de sponsors-titres, on assiste au développement de ligues compétitives professionnalisées en Afrique du Sud, Australie, Nouvelle-Zélande et donc aux Etats-Unis, avec la nouvelle WER, Women’s Elite Rugby.
Basées sur la rémunération des joueuses et un régime de compétition semi-fermée voire fermée, ces championnats garantissent aux rugbywomen les conditions de performance propres au haut-niveau et donc la possibilité de progresser dans les affrontements internationaux.
Economiquement, cette structuration permet des valorisations croissantes, avec par exemple une projection à plus de 180 M€ de revenus générés par la PWR. Aux Etats-Unis, Michele Kang a investi 4 millions de $ dans le programme de rugby féminin américain en 2024, précédant le lancement de la WER. World Rugby évalue le potentiel économique global du rugby féminin à 4,8 milliards de dollars, dont seulement 2 sont réalisés à date…
Parmi les leviers de la hausse attendue, le rôle des sponsors sera crucial dans l’accompagnement à la rémunération des joueuses. De Guiness (sponsor-titre du W6N) à Clinique, parrain du championnat anglais, les marques ont tout intérêt à soutenir les clubs et les joueuses, notamment sur le branding des réseaux sociaux, tout en misant sur le rayonnement de la Coupe du Monde 2025 « at home ».