Serie A Femminile : le « trending topic » à suivre du football européen ?
Alors que la Serie A Femminile eBay compte 2 représentants au top 15 du classement UEFA pour la première fois (Juventus 10ème, AS Roma 12ème), le non-renouvellement du Fonds Triennal pour le Professionnalisme du Sport Féminin tend à créer quelques incertitudes quant à la pérennité économique du football professionnel féminin dans la Botte. Pourtant, les indicateurs semblent être au vert, grâce à une stratégie fortement orientée vers le contenu digital et quelques coups d’éclats sportifs et d’affluence.
Tour d’horizon du développement opéré par la FIGC, et focus sur un club résolument atypique, amené à dynamiser l’industrie du sport professionnel féminin.
L’Italie, un pays acculturé au sport féminin
Si le championnat national féminin naît dès 1968, après un silence de près de 30 ans après-guerre, l’organisation fédérale sous l’égide de la FIGC n’intervient qu’en 1974 (la même année que la Division 1 française). Quant à la professionnalisation, acquise en 2022 (2 ans avant la LFFP), elle fait suite à une stratégie initiée dès 2017, avec l’appui des clubs professionnels masculins. Cette relative précocité (face à la France, l’Espagne ou le Portugal) tend à s’expliquer par la présence bien ancrée dans le paysage sportif du volley féminin, dont la popularité préexistente ouvre la voie aux joueuses de football.
Fort d’une grosse domination européenne, le volley féminin nourrit en effet des records d’affluence, comme lors du match Milan-Conegliano qui a réuni 12626 spectateurs.
Progression des moyens et croissance sportive
Premier constat, l’attractivité croissante de la Serie A Femminile eBay sur le marché des transferts, avec une augmentation de 33% des signatures entrantes entre 2022 et 2024, après l’introduction du professionnalisme en 2022. Sur la fenêtre estivale 2024, on note même que l’Italie dépasse la France en nombre de joueuses mutées.
Cette attractivité n’est pas surprenante, puisque l’introduction du professionnalisme a permis d’instaurer un salaire minimum annuel, à 26 000 euros bruts, rompant la précarité des joueuses de Série A. Cette garantie salariale nécessitant une structuration économique des clubs et de la fédération, chaque partie a su accroître ses revenus, en bénéficiant de l’accompagnement de partenaires actifs et volontaires. Ainsi, les exemples de l’AS Roma, du Milan AC et de la Juventus, dont les équipes féminines bénéficient de sponsors principaux différents des équipes fanions masculines, commencent à démontrer l’usage croissant de « l’unbundling » des droits commerciaux entre les sections. Le Milan AC et la Juventus ont ainsi également conclu des accords de naming spécifiques pour leurs stades ou centres d’entraînement.
Les instances fédérales sont tout autant actives, elles qui ont enregistré une croissance de 38% entre 2019-20 et 2021-22, et un triplement des revenus globaux de la Division Professionnelle Féminine (source : https://figc.it/media/uploads/federazione/trasparenza/FIGC-ReportCalcio2024_EN-LD_Alta.pdf), notamment grâce à l’internationalisation des droits TV de la Serie A Femminile eBay, récompensant une augmentation de 142% des audiences de la Série A.
Côté affluences, malgré des chiffres encore relativement faibles, la saison 23-24 a vu une augmentation de 20% des spectateurs, grâce notamment à des opérations événementielles dans les stades « des garçons », comme lors de l’affiche Juventus-Roma, disputée à l’Allianz Stadium devant près de 33000 spectateurs.
En résulte une croissance des moyens des clubs, la Juventus se propulsant par exemple à la quinzième place européenne des revenus du football féminin. Avec 1,2 M€, ceux-ci sont néanmoins marginaux et on constate le même schéma de dépendance économique des sections féminines en Italie qu’en Europe.
Trending Topic, les très belles performances des réseaux sociaux
En consultant le très fourni « Social Report 2023-2024 », on observe l’importance stratégique des réseaux sociaux pour la FIGC envers ses fans. Face à une captation TV souvent réductrice, les réseaux sociaux sont l’essentiel du potentiel d’image du football féminin italien.
Avec un développement axé notamment sur Instagram et TikTok, et une stratégie de contenu basée sur les joueuses et les highlights (YouTube), le football féminin italien cible précisément les audiences réputées plus jeunes et plus agiles numériquement.
En haut de la liste (réalisée par ordre alphabétique), on aperçoit le FC Como Women, un cas atypique, porteur d’une dynamique nouvelle.
Le FC Como Women, club indépendant et stratégie de marque ultra-contemporaine
Fondé en 2019 par Stefano Verga, le FC Como Women acquiert une notoriété et une dimension internationale en 2024, quand à l’issue de leur promotion en Serie A, le fonds d’investissement spécialisé dans le football féminin Mercury/13 rachète le club et le projette dans une image résolument contemporaine et ancrée dans les enjeux sociétaux du développement du sport féminin.
Soutenue depuis décembre 2024 par le fonds Avenue Sports, Mercury/13 et le FC Como multiplient les partenariats, en engageant le club comme une véritable plateforme de changement sociétal en faveur des femmes.
Etendard du « découplage » et de l’indépendance des équipes féminines professionnelles, le FC Como préfigure-t-il, comme l’Olympique Lyonnais en France, une nouvelle ère du développement du football italien ? Réponse à suivre !