Les mascottes, quel actif marketing pour les clubs féminins ?
Connaissez-vous Maddli, Scotty, Ollie & Dewey, Ellie, Dragonette, Jord’Âne et Léa ? Ce sont les mascottes de l’Euro 2025, de Zwift, des World Aquatics Singapour 2025, des New-York Liberty, du Metz Handball, des Tango Bourges et du Stade Bordelais Féminin. Les mascottes sont des personnages centraux dans nos souvenirs d’événements sportifs (qui n’a pas souvenir de Footix en 1998, ou des Phryges de 2024), mais au-delà de leur apparence de peluches enfantines, elles représentent un actif marketing essentiel. Dans le cadre spécifique du sport féminin, les mascottes investissent même des enjeux supplémentaires. Comment déployer une stratégie efficace centrée sur sa mascotte? Du choix de son incarnation à son activation auprès des partenaires commerciaux, découvrez les secrets des mascottes sportives avec SportpowHER.
Que représente la mascotte d’un club ?
Originellement, la mascotte est une sorte de totem porte-bonheur, selon une dénomination inventée au milieu du XIXème siècle.
Depuis les années 60, ce totem est devenu l’ambassadeur central de l’identité donnée à un événement ou une marque sportive. Puissant véhicule commercial comme le rappelle Jérôme Boissel, sa notoriété peut dans certains cas dépasser celle des champions et championnes qui concourent, comme Bing Dwen Dwen le panda des Jeux Olympiques de Pékin en 2022 (Aojun Liang, Lin Sun & Hong Wang, Scientific Reports, 2025).
Pour construire le personnage de la mascotte, les marques sportives (clubs, tournois) peuvent investir différentes symboliques mais une constante persiste avec l’anthropomorphisme du personnage qui sera retenu. Comme le décrit la littérature associée au “branding”, la mascotte présente des attributs physiques “humanisés” qui visent à réduire la distance psychologique entre la marque et le consommateur, en lui conférant une identité reconnaissable et associée à des stéréotypes rassurants (McGill, Agrawal). En dehors de l’anthropomorphisme, les responsables marketing ont le choix entre des incarnants animaliers, légendaires ou historiques, selon les attributs de marque à personnifier. Dans l’univers sportif féminin français, on retrouve de nombreux incarnants issus de la faune réelle ou légendaire : lion, panthère, dragon, souris, grenouille, ours, girafe, canard, korrigan, cigogne…
Quand elle n’est pas humaine, la mascotte a un rôle de représentation plus inclusive en gommant les effets de genre ou les normes adressées au corps des individus. La question du genre des mascottes étant moins discutée en France qu’aux Etats-Unis, on retrouve de façon plus équilibrée des mascottes mâles et femelles, avec tout de même une propension à féminiser les mascottes dans les clubs féminins.
Un outil d’attachement à la marque et à ses valeurs revendiquées
La mascotte rend tangible des attributs de différentes natures. Cela peut-être un patrimoine local (Korry au RMHB, la cigogne d’Alsace au RCSA, Gergovix à l’ASM Romagnat, Dragonnette à Metz), des qualités physiques fantasmées (les girafes en basket-ball ou en volley), des valeurs morales telles que la combativité, l’esprit d’équipe (lion, panthère, Flammix au FCB) ou des symboles liés à la fondation de la marque (Merlux à Lorient).
Ces attributs rendus tangibles permettent aux spectateurs et consommateurs de s’approprier les valeurs revendiquées par la marque (ici le club) à travers une figure d’identité qui complète le branding. On retrouve cette notion d’identité de marque chez Kapferer (“prisme d’identité”) et Géraldine Michel, dont le concept de noyau central permet explicitement de comprendre le rôle de la mascotte dans la fidélisation et l’attachement.
Le noyau central est l’ensemble des marqueurs “identitaires” fondamentaux de la marque, ce en quoi elle est reconnue instantanément. Autour de ce noyau central, gravitent des attributs périphériques qui sont des éléments forts de la notoriété mais aussi des valeurs perçues par les consommateurs. La mascotte va ici agréger les marqueurs identitaires comme les couleurs, le surnom de l’équipe ou la devise, tout en devenant elle-même un objet de notoriété puisque présente à chaque rencontre. La mascotte sert aussi de levier d’attachement pour des jeunes publics en tant qu’objet de merchandising à destination des plus jeunes. Elle est donc vecteur au moins d’affinité affective (Hémar-Nicolas, d’après Jérôme Boissel) si ce n’est lien de fidélisation (Eisend & Stokburger-Sauer, Keller).
La mascotte remplit donc plusieurs fonctions marketing : incarnant d’identité et levier merchandising, puisque très populaire en tant que souvenir de match ou alternative aux maillots pour les publics les plus jeunes.
Un support d’animation in-stadia essentiel
Pour paraphraser Michele Kang, présidente de l’OL Lyonnes et de Kynisca, les spectateurs ne viennent plus au stade seulement par soutien à l’équipe, ils viennent vivre une expérience, sociale, émotionnelle, projective. Dans ce qui est défini comme la fan-expérience, la mascotte endosse un rôle d’animation crucial en amont, pendant, voire après les rencontres.
Ainsi la mascotte anime des jeux ou des danses qui entretiennent l’interactivité entre le terrain et les tribunes. Sa présence offre l’opportunité de photos, le plus souvent relayées vers les réseaux sociaux. Pendant les temps faibles du spectacle sportif, la mascotte contribue à animer le public en allant à sa rencontre, ou en participant à des spectacles.
@espnw Showin’ out in front of company 😭 #WNBA #AllStar #dance #mascots
L’ensemble des études disponibles (Wasserman, Two Circles, WST…) démontre une mixité plus importante dans les publics d’événements sportifs féminins, notamment avec une plus grande présence de familles. La mascotte remplit donc un rôle d’interconnexion plus importante dans le sport féminin puisqu’elle permet de fédérer des populations aux motivations plus distinctes. Pour les clubs féminins, il est donc nécessaire de définir la personnalité accordée à la mascotte afin de créer la meilleure affinité avec des publics variés. A ce titre, l’exemple d’Ellie the Elephant, la mascotte des New-York Liberty (WNBA) est très inspirant :
“Ellie a du cran. Ellie est chaleureuse. Ellie est un vrai show à elle seule. Elle déborde de caractère, elle est d’une richesse incroyable, et elle a un style à couper le souffle. Je décrirais Ellie comme une icône de mode, une athlète accomplie et une danseuse envoûtante. C’est LA fille — celle qui fait tourner toutes les têtes.” (The Guardian, 2024)
Ce travail de personnalité implique donc que la mascotte doit être une ressource à part entière du club, et donc professionnalisée, à l’exemple des mascottes américaines. Animatrice de performances athlétiques et de comédie, la mascotte ne peut pas être confiée à des bénévoles roulants, elle est un actif de la proposition événementielle du club.
Comment utiliser sa mascotte auprès de ses partenaires ?
Comptablement, un actif s’amortit ou se rentabilise. Puisqu’elle est incluse dans la proposition événementielle du club, la mascotte peut donc servir de point d’activation pour les campagnes des sponsors. Historiquement et stratégiquement, les mascottes, notamment animales, sont un puissant levier d’influence des consommateurs (Keller/Gierl, Effectiveness of Animal Images in Advertising, MARKETING · ZFP · Volume 42 · 1/2020), et celles des clubs peuvent ainsi être des prescripteurs d’influence pour les marques sponsors.
On retrouve plusieurs typologies d’activations entre des mascottes et les partenaires :
- Le co-branding photo : le partenaire logotype un photobooth permettant la prise de photographies et l’envoi numérique d’images mentionnant des hashtags et le nom du partenaire
- La prescription extérieure : la mascotte va remplacer des ambassadrices humaines de l’équipe pour apposer la recommandation du club au service ou produit partenaire. Une stratégie utile dans des disciplines à forte rotation d’effectifs sportifs.
- Le co-branding textile : l’équipementier crée une collection à l’effigie de la mascotte et la distribue en édition limitée, à forte valeur patrimoniale (collection, affinité, héritage).
- La prescription directe : la mascotte détient et distribue des “goodies” ou des échantillons de la gamme du sponsor en direction du public
- La promotion territoriale : dans le cas de participation forte de la collectivité dans le modèle économique du club, la mascotte peut être directement rattachée à la promotion d’un élément de patrimoine et ainsi servir de vecteur touristique (Korry à Rennes, Lampi à Lens, Gergovix à Clermont…)
- La promotion d’objectifs RSE : le sport féminin disposant d’une forte attribution RSE, la mascotte peut être mandatée par le partenaire pour véhiculer ses engagements sociétaux
La mascotte remplit plusieurs fonctions essentielles et structurantes pour la fan-expérience et l’activation partenariale. Elle est par elle-même un objet merchandising attractif, créateur direct de valeur commerciale et affinitaire. Pour les clubs féminins, elle remplit un rôle supplémentaire au coeur d’un public plus mixte, et endosse des fonctions de prescripteur RSE pour des partenaires. Elle est donc une ressource marketing incontournable.