Diffusion du sport féminin en France, la croissance passe par le digital

Le 8 mars dernier, l’ARCOM publiait son rapport sur la « Représentation des femmes à la télévision et à la radio ». Les observations faites constatent sans surprise une disparité nette, et en ce qui concerne le sport, l’inégalité est criante : « le sport féminin représente 4,8 % du total des diffusions sportives à la télévision, contre 74,2 % pour le sport masculin« . De ce sombre tableau pointe néanmoins quelques rayons de positivité, avec l’augmentation de 50% depuis 2018 du volume horaire de retransmission des compétitions féminines. Sur le volet télévision, la consommation est majoritairement le fait des retransmissions sur les chaînes généralistes.

Une concentration des télédiffusions sur les GESI

Toutefois, l’ARCOM fait le commentaire selon lequel les « fans » de sport au féminin passent en priorité par les chaînes spécialisées sportives, y compris payantes. La prémanence des chaînes gratuites généralistes est en effet liée à la diffusion ponctuelle des grands événements : Coupe du Monde FIFA 2019, Championnats du Monde Handball, VI Nations, Tour de France Féminin ou les JO.

L’audience télévisée des compétitions saisonnières domestique est à la fois plus faible et plus discrète. Canal + n’a par exemple pas communiqué les audiences de la D1 Arkéma (alors qu’ont été communiquées les audiences de Saudi Pro League), ni Dailymotion, dont la qualité de diffusion a été source de polémiques. Pas de données disponibles également pour la diffusion conjointe entre Skweek, Sport en France et France 3 sur les matches de LFB. En LFH, les statistiques sont également difficilement disponibles.

Au niveau des compétitions européennes, bien que l’on ne dispose là encore pas des données pays par pays, on constate des dynamiques croissantes sur 3 des 4 principales disciplines de sport collectif féminin (football, handball, basketball, volley-ball).

Pour la saison 2023/24, à noter que les clubs français se sont particulièrement illustrés avec Villeveuve d’Ascq (Basket), les Neptunes de Nantes (Hand, Volley), Metz (Handball) et Lyon (Football) qui ont participé aux demis et/ou aux finales européennes.

Le digital, levier de croissance pour la médiatisation du sport au féminin

Le sport au féminin n’a pas la même place que le sport au masculin dans l’écosystème médiatique. Face aux inégalités persistantes, les sportives et les communautés qui les accompagnent ont investi les média sociaux et les plateformes, dans des proportions au moins équivalentes que les tendances portées par la « Gen Z ». Ainsi, YouGov a publié les résultats suivants :

Les plateformes sociales sont un moyen de consommation des contenus sportifs prisé par 35% des femmes (33% en moyenne), un engagement inférieur à la classe d’âge 18-24, mais qui a la particularité d’être plus transversal selon les générations chez les spectatrices.

On retrouve ces indices d’engouement social chez les consommateurs de sport au féminin dans l’étude menée par Women’s Sports Trust.

DAZN, capitaliser sur le sport au féminin

Avant de remporter l’appel d’offres baissier de la Ligue 1 – McDonald’s, DAZN avait déjà posé le pied dans le football français, puisque la plateforme britannique diffuse sur son compte YouTube l’UEFA Women Champions League. En misant sur la gratuité, DAZN offre une vitrine au football féminin tout en construisant un produit d’appel vers ses contenus payants. En effet, à l’exception de l’Angleterre, le football au féminin dispose d’un modèle économique encore trop peu mature pour des retransmissions payantes (cf W. Andreff pour le cas du football féminin en France). Le paysage médiatique des autres disciplines majeures passant déjà par les opérateurs payants, les compétitions féminines y voient des terrains à conquérir (Eurosport notamment).

Les autres plateformes majeures (Amazon, Netflix) s’engagent peu à peu dans le sport au féminin, suivant l’exemple tracé par DAZN, mais avec des stratégies différentes. Amazon investit le marché américain, porté par la WNBA et la NWSL, quand Netflix développe surtout des séries documentaires, à l’instar de ce qui est fait pour le sport des garçons (Drive To Survive, Break Point…).

Enfin, grâce à la télévision numérique, de nouveaux acteurs ont investi le marché de la diffusion du sport au féminin. On peut d’abord citer la chaîne W Sports, disponible en France sur le bouquet Free.

Mais également France 3, dont les déclinaisons régionales, accessibles à tous sur les bouquets numériques offrent des retransmissions de matches de LFB notamment.

La médiatisation des compétitions féminines passe donc par l’essor des solutions numériques et digitales, par le streaming et les contenus sociaux. Cet écosystème peut constituer un levier de ressources, puisque les engagements (clics, réactions, conversions) sur le sport au féminin sont supérieurs aux contenus « masculins ».