Maillots et merchandising dans le sport féminin
Les premiers JO paritaires de l’histoire vont s’ouvrir, et avec eux l’on s’apprête à découvrir les tenues des athlètes sur les pistes, parquets, bassins, terrains… Et alors que les tenues féminines sont toujours sujettes à polémique, l’occasion se présente de faire un point sur l’évolution du marketing autour des tenues et équipements sportifs des athlètes féminines.
Invisibilisation et sexualisation
source : https://www.bbc.com/news/world-41742378
Lors de la naissance du sport moderne, les femmes sont soumises à la “décence” et à l’expression de leur rang, bourgeois le plus souvent. Elles vont donc arborer des tenues longues et relativement peu fonctionnelles, assez peu distinctes des tenues du quotidien. Il y a donc sexualisation du corps, qu’on ne saurait montrer, et invisibilisation de l’athlète, dont les performances sont forcément impactées par le carcan vestimentaire.
Au fur et à mesure de l’acceptation et de la démocratisation du sport pratiqué par les femmes, les tenues vont évoluer vers plus de fonctionnalités, mais sans renier la sexualisation des corps, voire en accentuant leur érotisation, comme en témoignent les équipements en athlétisme, tennis, gymnastique et évidemment le beach-volley.
Réappropriation et merchandisation
La disparité de genre dans le rapport aux tenues sportives a connu un renversement au cours des années 2010. D’abord avec la mobilisation des athlètes qui vont revendiquer le droit à disposer de leurs corps offerts à la vue des publics, officiels, spectateurs. Ces revendications vont du port du hijab par les footballeuses musulmanes à l’abandon du bikini par les beach-volleyeuses norvégiennes.
Puis un autre tournant va intervenir en 2019, avec une nouvelle merchandisation dans le football féminin, sous l’impulsion de Nike, à l’occasion de la Coupe du Monde de Football se déroulant en France. Cette année, pour la première fois, les sélections nationales féminines arborent un maillot différent de leurs homologues masculines.
source : https://www.dezeen.com/2019/03/12/womens-world-cup-2019-kits-nike-france-usa/
C’est un tournant car ces maillots sont disponibles à la vente et l’on assiste à la naissance d’un merchandising d’identification “pionnier”, qui offre à tous les fans l’opportunité de s’offrir le maillot, y compris floqué, de sa joueuse ou sa sélection favorite.
C’est de fait une opportunité de croissance claire pour les équipementiers, qui peuvent aller à la conquête de nouvelles cibles en répondant à une aspiration jusque-là peu considérée.
Alors que dans le modèle américain des franchises, la distinction entre clubs masculins et féminins est établie depuis longtemps, le merchandising spécifique des maillots féminins était encore très confidentiel, notamment dans ses résultats de ventes. Toutefois, l’évolution de la société vers plus d’inclusivité, les efforts des ligues et des diffuseurs pour augmenter la visibilité des événements et compétitions, ainsi que l’avènement de figures modèles comme Megan Rapinoe, Caitlin Clark, Selma Bacha, Sam Kerr, Angel Reese, Mary Earps ont nourri une croissance exponentielle sur le merchandising de maillots féminins :
- en WNBA, Fanatics enregistre une croissance de 500% sur les articles “Ligue” et plus de 1000% sur les articles reliés à des joueuses
- En NWSL, le “retail” a augmenté de près de 300 %
Tendances et prospective sur le marché de “l’apparel”
Le marché des maillots de clubs ou de sélections est une locomotive pour un marché plus vaste, celui de “l’apparel”, le textile en français. On estime aujourd’hui que le marché de l’apparel sportif féminin atteint 4 milliard de dollars aux seuls USA (https://frontofficesports.com/womens-sports-merchandise-market-4-billion/) , avec des perspectives encore plus vastes au niveau mondial :
Cette croissance est promue par l’augmentation continue de la pratique sportive, l’augmentation de la diffusion des compétitions féminines, et surtout par la création de gammes dédiées, tenant compte des spécificités morphologiques (bassin, pieds, hanches, poitrine) ou physiologiques (menstruations). Ainsi, selon Euromonitor International, le sportswear au féminin nourrit une croissance annuelle de 5% contre 3% sur le segment global.
On assiste ainsi au développement de marques soit naissantes, soit challengers, qui viennent innover sur le terrain de l’équipement sportif féminin. On prendra en exemple la marque Lululemon, qui s’inscrit désormais dans le top 10 des marques sportives mondiales :
Le marché est donc encore loin d’être parvenu à maturité, et l’évolution positive de la mise en lumière des athlètes, sportives féminines contribuera à produire une offre toujours mieux adaptée pour les performances du quotidien et du haut-niveau.